Bombardée par les forces de la coalition en 2003, la cité d’Achraf subit dans les années qui suivirent diverses agressions : tirs de missiles, sabotages de la station de pompage privant d’eau potable, outre les résidents, 20 000 habitants de la province, attaque d’un véhicule transportant des Irakiens venant travailler au camp…Mais, rien de comparable à ce qui allait se produire après que les Américains aient livré Achraf aux forces armées irakiennes, avec l’assurance mensongère que les résidents seraient traités humainement.
Consciente du danger potentiel, la Résistance iranienne et ses amis multiplièrent les mises en garde, organisèrent des conférences, des sit-in, des manifestations, adressèrent lettres sur lettres au président des USA, au secrétaire général de l’ONU. Rien n’y fit. Le premier ministre irakien put préparer au grand jour l’attaque du camp, sans que personne n’intervienne pour s’y opposer puis, au retour des Etats-Unis, ordonner à ses troupes de donner l’assaut.
Les 28 et 29 juillet 2009, les agresseurs armés de bâtons cloutés, de barres de fer, de haches et, certains, de fusils, tuèrent 11 résidents et en blessèrent plus de 500. Des vidéos filmées durant l’attaque montrent un camion de pompier projetant de l’eau bouillante et un engin blindé slalomant pour tenter d’écraser un maximum de monde. Durant trois jours le camp fut dévasté. Les assaillants ont saccagé, pillé, profané, faisant pour plus de 2 600 000 § de dégâts, sans compter les dommages causés aux véhicules, à la voierie et aux installations publiques.
Trente-six Achrafiens qui se trouvaient à l’entrée du camp au moment de l’assaut furent pris en otages, molestés, traînés de prison en prison pour n’être libérés, presque mourants, qu’après 72 jours de captivité.
Une vague de protestations s’éleva de toutes parts. On fit une nouvelle fois appel aux forces américaines pour qu’elles reprennent provisoirement le contrôle du camp. On demanda la fin du blocus, l’autorisation pour les organisations humanitaires d’entrer et de travailler dans le camp, l’instauration d’une commission d’enquête internationale, l’envoi et le maintien à Achraf d’une délégation d’observateurs internationaux. Aucune réponse positive ne fut donnée. Le juge espagnol Juan Garces, au nom du principe de la compétence universelle cita à comparaitre les militaires responsables de l’opération, mais, bien entendu, aucun ne se présenta.
Le temps passa, le blocus s’intensifia et au début du mois d’avril 2011, l’armée irakienne déploya 2500 hommes et des blindés autour du camp en prévision d’une nouvelle attaque. Une nouvelle fois, les USA, l’ONU furent alertées mais ne bougèrent pas et, le 8 avril, fut lancé un nouvel assaut encore plus meurtrier que le précédent qui fit de nombreuses victimes par balles.
On dénombra 34 morts dont 8 femmes et, cette fois encore, les blessés se comptèrent par centaines. Certains allaient décéder dans les jours qui suivirent, faute de soins en raison du blocus. 24 h après l’attaque, le premier ministre irakien reçut les félicitations officielles du régime iranien qui regrettait seulement que le carnage n’ait pas été plus important. Un peu partout, de nombreuses voix se firent entendre pour condamner ce nouveau massacre, dont celle du Prix Nobel de la Paix, Elie Wiesel.
Que se passera-t-il fin 2011 quand expirera le délai fixé aux Achrafiens par Nouri al-Maliki pour quitter leur base ; délai matériellement impossible à tenir ? Avec de tels précédents, il y a lieu d’être inquiets. La communauté internationale assistera-t-elle sans broncher à un nouveau bain de sang ? Les Américains permettront-ils à celui qu’ils ont contribué à mettre en place à utiliser les armes et les véhicules payés par eux pour commettre un nouveau crime contre l’humanité ? L’heure de vérité approche. Il est temps que l’Organisation des Nations Unies prenne ses responsabilités, envoie ses casques bleus, car le fait que l’Irak soit un état souverain ne dispense pas ses dirigeants de respecter les conventions internationale dont la convention de Genève qui accorde asile et protection aux Achrafiens. Quant au président Obama, il n’aurait qu’un geste à faire, rayer l’OMPI de sa liste noire ce qui ôterait tout argument au premier ministre irakien pour en persécuter les membres. Mais le Prix Nobel de la Paix par anticipation se décidera-t-il enfin à justifier par des actes l’honneur qui lui fut fait ?