« L’Iran va vers une grande catastrophe ». C’est ce qu’a déclaré au quotidien Shahrvand, dans une interview publiée le 27 avril 2015, Issa Kalantari, ancien ministre de l’agriculture de 1989 à 2001. Il faisait allusion à la raréfaction des ressources en eau du pays qui pourrait, selon lui, dans un avenir proche, contraindre 50 millions de personnes à quitter le pays.
Un climat particulier
L’Iran se trouve dans une région assez aride du Moyen-Orient. On estime que la quantité d’eau produite par les précipitations, sous forme de pluie ou de neige, est d’environ 417 milliards de m3 dont environ 72% s’évaporent. Seuls 118 milliards de m3 restent disponibles. Par ailleurs, les trois quarts du territoire ne reçoivent que 25% de cette eau.et seulement 25% des précipitations annuelles se produisent durant la période d’irrigation des terres agricoles qui ont donc besoin d’un apport d’eau complémentaire.
Un important besoin d’irrigation
La plus grande partie du sol iranien n’est pas arable. Moins de 200 000 km2 sont exploités par l’agriculture et 92% de ces terres ont besoin d’être irriguées. A peu près suffisantes avant la Révolution les quantités d’eau nécessaires à l’irrigation le sont de moins en moins en raison de l’accroissement des surfaces concernées. Cette situation résulte de la décision des autorités qui, pour développer l’agriculture, ont préconisé la mise en culture de terres irrigables supplémentaires à proximité des lacs et des rivières, fermant les yeux devant les forages non autorisés de puits épuisant la nappe phréatique et la construction anarchique de plus de 500 barrages, la plupart par la société de travaux publics et d’ingénierie Khatam al-Anbia contrôlée par le Corps des gardiens de la Révolution.
Des ressources confisquées ou gaspillées
D’énormes quantités d’eau sont détournées pour alimenter les industries d’armement, les sites nucléaires, gros consommateurs et les exploitations agricoles aux mains des pasdarans.
Un gaspillage important est dû au système traditionnel d’irrigation des petites propriétés. Chaque propriétaire a droit à une certaine quantité d’eau qu’il prélève sur un cours d’eau environnant au moyen d’une rigole creusée dans le sol, d’où de grosses pertes par infiltration et évaporation.
Des conséquences dramatiques
L’Iran consomme plus d’eau que la nature en fournit. Au début de la Révolution, la surconsommation d’eau dans tout le pays était de 100 millions de m3 par an. Elle atteint aujourd’hui 11 milliards de m3. Il en résulte un assèchement des lacs et des cours d’eau provoquant des catastrophes écologiques et une pénurie d’eau potable qui affecte plus de 500 villes.
Assèchement des lacs : Le lac salé Oroumieh a perdu en vingt ans 95% de son eau. Dans la province du Sistan-Balouchistan, l’assèchement du lac Hamoun a provoqué le départ de 130 000 personnes. 15 000 pêcheurs ont perdu leur travail. Le lac Maharlou à Chiraz est sinistré par suite de déversements massifs d’égouts. Le lac Alagol d’une surface de 25 km2 est pratiquement à sec. La faune et la flore disparaissent à vue d’œil. L’assèchement des 120 000hectares du lac de Bakhtegan a provoqué des tempêtes de sel et diverses maladies de la population. La terre agricole est maintenant salée.
Assèchement des fleuves : Le débit du fleuve Zayandeh a diminué de moitié en 25 ans. A Ahvaz, la profondeur du fleuve Karoun n’est plus que de 1 m. Même les petits bateaux ne peuvent plus l’emprunter.
Pollutions et drames humains : L’eau de la ville d’Ahwaz contient du gaz éthane. Il suffit de craquer une allumette près du robinet pour qu’une flamme jaillisse. Dans les trois dernières années plus de 40 000 personnes ont souffert de maladies respiratoires. Victimes de la crise de l’eau beaucoup d’agriculteurs de la province de Fars ont quitté leurs terres pour la banlieue pauvre des grandes villes. Il en est de même pour les habitants du Sistan-Balouchistan.
Catastrophes écologiques : 30 000 poissons sont morts à Aligoudarz dans l’eau polluée du fleuve. Des millions de sardines sont mortes soudain le 15 août sur les rives de Parsian provoquant l’inquiétude des pêcheurs de thon qui se nourrit de sardines.
Perspective
La question de l’accès à l’eau potable va se poser de plus en plus, d’autant que le guide suprême a décidé l’abandon de la politique de contrôle des naissances et a pour objectif une population de 150 millions d’habitants. Israël dessale l’eau de mer. Pourquoi pas l’Iran ?