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S’il n’avait pas eu autant de sang sur les mains, il aurait peut-être pu paraître sympathique avec sa grosse bouille imberbe de margoulin roublard enrichi par le commerce des pistaches et des magouilles immobilières. En réalité, Ali Akbar Hachémi Rafsandjani, qui vient de mourir d’une crise cardiaque à 82 ans était un manœuvrier retors et sans scrupules, une anguille politique qui avait réussi à se hisser à la présidence de l’Iran, lui qui n’était qu’un religieux de second ordre.
Né le 23 août 1934 à Bahreman, dans la province de Kerman, près de la ville de Rafsandjan, au sein d’une famille d’agriculteurs aisés, le jeune Rafsandjani fréquenta, dès l’âge de cinq ans, l’école traditionnelle du district de Nouq puis, à quatorze ans, partit suivre l’enseignement des ayatollahs de la ville sainte de Qom. Il suivit durant six ans celui de l’ayatollah Khomeiny dont il devint un fidèle, abandonnant l’étude pour l’activisme politique contre le Shah. Lié au Parti de coalition islamique, instigateur de l’assassinat, en janvier 1965, du Premier ministre Hassan-Ali Mansour, il fut arrêté à sept reprises et purgea quatre ans et six mois de prison. Il y fit la connaissance d’une palette hétéroclite d’opposants au Shah. Découvrant l’aura des Moudjahidine du peuple (OMPI) parmi les opposants, il se présenta même un temps comme un sympathisant de ce mouvement qu’il allait combattre férocement par la suite.
La révolution de 1979 et la prise du pouvoir absolu par son mentor Khomeiny, permit au multi millionnaire Rafsandjani d’accéder aux plus hautes fonctions. Il participa à la création du Corps des Gardiens de la révolution (pasdarans) et présida la première assemblée islamique créée en 1980. Il fut aussi l’un des fondateurs de l’Association du clergé militant et du Parti de la République islamique qu’il fit dissoudre en 1987 en raison de querelles internes. C’est encore lui qui amena Khomeiny à créer, en 1988, le Conseil de discernement de l’intérêt supérieur du régime chargé d’arbitrer les litiges entre les diverses institutions de l’Etat.
La guerre Iran-Irak (1980-1988) le vit occuper plusieurs fonctions clés : président de l’Assemblée, Iman de la prière du vendredi, substitut du commandant en chef des forces armées. Constatant le fiasco de la guerre, il persuada Khomeiny d’accepter l’arrêt des hostilités, après avoir longtemps encouragé cette tuerie inutile. Il occupait encore ce poste quand le régime décida l’exécution massive des prisonniers politiques en 1988 où 30000 ont été pendus en quelques mois, en particulier les militants de l’OMPI.
Deux mois après la mort de Khomeiny survenue le 3 juin 1989, Rafsandjani fut élu président de la République, succédant à Khamenei choisi pour remplacer le Guide suprême défunt. Il fut reconduit quatre ans plus tard puis céda sa place à Khatami pendant huit ans. A nouveau candidat en 2005, il fut battu au second tour par l’ultra conservateur Mahmoud Ahmadinejad.
Le mouvement contestataire de juin 2009 contre le résultat de l’élection renouvelant le mandat d’Ahmadinejad vit Rafsandjani prendre le parti de Moussavi, premier ministre de Khomeiny et candidat malheureux. A cette époque, il fut contraint d’abandonner sa fonction d’Iman de la prière du vendredi. Déclaré trop âgé par le Conseil des Gardiens de la Révolution, Rafsandjani ne fut pas autorisé à se présenter à l’élection de 2013. Il apporta alors son soutien à Hassan Rohani et prit une magistrale revanche sur le guide suprême en se faisant élire, le 26 février 2016, à l’Assemblée des experts.
Manœuvrant adroitement entre les deux principales fractions du régime favorables, l’une à l’économie de marché et à la suprématie des grands commerçants du bazar, l’autre au renforcement du secteur public, Rafsandjani fut certainement un bon gestionnaire, et un stratège machiavélique. Il n’avait pour autant aucun respect pour les droits de l’homme. Sous la présidence de Khatami, ses adversaires de tous bords l’ont accusé d’être à l’origine de quantité de meurtres et de disparitions d’intellectuels et d’hommes politiques dissidents à l’intérieur du pays et des assassinats d’opposants à l’étranger comme Shapour Bakhtiar, dernier premier ministre du Shah, en France, des opposants kurdes iraniens, à Vienne (1989) et Berlin (1992) ou Kazem Radjavi, frère de Massoud, le leader de la Résistance iranienne, le 24 avril 1990 à Genève.