Le 3 février, une sévère empoignade a opposé le président de la république des mollahs, Mahmoud Ahmadinejad, à celui du Parlement, Ali Larijani, dont le frère, Sadegh, est à la tête du pouvoir judiciaire. Il ne s’agit pas de divergences idéologiques comme on aurait pu le penser mais bien plutôt d’un sordide conflit d’intérêt pour le contrôle de la Caisse d’investissement de la sécurité sociale, l’une des plus grandes sociétés d’investissement en Iran, un conglomérat de 250 sociétés.
Cet organisme a la haute main sur une partie des secteurs de la pharmacie, du ciment, du gaz, de pétrole, de la construction, de l’immobilier, des nouvelles technologies, du transport et de quelques 1200 holdings. Ahmadinejad voulait que soit nommé à sa tête un homme à lui, le sinistre Saïd Mortazavi, ex-procureur de Téhéran. Le clan Larijani, lorgnant sur le pactole, n’était pas d’accord. Le 3 février, le Parlement présidé par Ali Larijani a destitué Mortazavi de son poste de ministre du travail. Ahmadinejad a répliqué en projetant, en pleine séance parlementaire, une vidéo accusant la famille Larijani de corruption.
Ce conflit au sommet de l’Etat, lors de cette journée qualifiée par la presse de « dimanche noir », sape l’autorité du Guide suprême, dont la chute vertigineuse de l’influence au sein du régime saute aux yeux du public. De toutes parts, on l’interpelle : « N’avez-vous pas dit, au sujet des haut-responsables, que celui qui déballe en public ses différents est un traitre ? Alors, pourquoi ne châtiez-vous pas les traitres qui sont à la tête des deux pouvoirs ? »
Dans les milieux religieux de Qom, l’altercation entre Ahmadinejad et Larijani a suscité de nombreux commentaires. Il est courant d’entendre : « Si dans le passé, les propos d’Ali Khamenei étaient respectés pendant au moins trois mois, maintenant, ils ne durent guère plus d’une heure ». Pour sa part, l’ayatollah Djavadi Amoli a déclaré en privé que quand deux des pouvoirs s’entredéchirent, cela démontre que Khamenei n’a plus la compétence pour gérer le pays.